Constantine:
25-12-2007, 07:17 AM
CONSTANTINE:
(QACENTINA)- Cirta


Par M. A. Haddadou


Constantine est la capitale de l’Est algérien, à 421 kilomètres d’Alger. Elle est située à 649 m d’altitude, sur un plateau rocheux isolé par des gorges profondes et parcouru par un oued, le Rummel.
Il est évident que le choix d’un tel site pour la construction d’une ville obéit à des choix stratégiques : Constantine, réfugiée sur son rocher, a la réputation d’être une ville imprenable !
Le site a été occupé dès la période préhistorique, ainsi que l’attestent les nombreux vestiges retrouvés.
Les sphéroïdes à facettes, découverts en 1945 sur le plateau de Mansourah, remontent au paléolithique inférieur et compteraient parmi les vestiges les plus anciens de l’Algérie. Les grottes du Mouflon et de l’Ours, sur le versant nord de Sidi M’cid, ont livré, elles, des instruments de la période néolithique. Enfin, il faut citer les fameuses escargotières, immenses monceaux de coquilles d’escargots, consommés par les hommes qui ont occupé les sites….

Des lointaines périodes, Constantine a conservé aussi de nombreuses peintures rupestres, ainsi que des inscriptions libyques, l’ancêtre de l’écriture berbère, conservée aujourd’hui chez les Touareg sous le nom de tifinagh.
L’art berbère antique est représenté par de nombreuses poteries décorées.

***(II)***
Les Phéniciens ont occupé le site et auraient appelé la ville qui s’y trouvait Sarim-Batim, on pense aussi que ce sont eux qui lui ont donné le nom sous lequel elle était connue dans l’antiquité :
Cirta, prononcé aujourd’hui Sirta mais qui devait se lire Kirta. On pense, en effet, que le nom pourrait dériver du punique Qart et signifier «ville», à l’image de Carthage, qu’il faut lire Qart- H’adash, «la nouvelle ville». Signalons toutefois que cette étymologie a été contestée, le K de Cirta ne couvrant pas le q du punique. Il n’est pas impossible donc que le nom soit d’origine berbère.
Cirta est devenue au 2e siècle avant J.-C. la capitale de royaumes numides, d’abord celui de Syphax, puis de son adversaire Massinissa qui l’a vaincu. C’est cette ville que les Romains appelaient Cirta Regia.
A la mort du roi Micipsa, fils de Massinissa, les Romains interviennent dans les affaires de Numidie et divisent le royaume, entre les fils de Micipsa, Hiempsal et Adherbal et son neveu, Jugurtha. Cirta est échu à Adherbal ainsi que les territoires de l’est : refusant la partition du pays, Jugurtha lui fait la guerre et s’empare de Cirta, ce qui va pousser les romains à lui faire la guerre.
Après la défaite de Jugurtha, la ville, comme le reste de la Numidie, est annexée par les Romains.
Elle prend le nom de Colonia Cirta, devenant la capitale de la Confédération cirtéenne et comprenant la ville de Mila (Milev), Collo (Chullu), Skikda (Rusicade), puis Cuicul (Djémila).

***(III)***
La ville est romanisée et, reliée au port de Rusicade, elle devient un centre actif de colonisation. La paix romaine sera souvent troublée par les attaques des tribus numides hostiles à l’occupation, et c’est pour contenir ces tribus que les Romains vont construire les castella, des camps fortifiés, dont le plus important est celui de Tiddis.

Le christianisme s’y développera au milieu du IIIe siècle et les Romains, voyant dans l’adhésion des populations à la nouvelle religion une forme d’opposition à leur domination, persécuteront ses adeptes.
L’édit de Milan ramène la paix et les chrétiens vont célébrer librement leur religion. Au IVe siècle, Constantine connaît de graves troubles. Après l’insurrection de 311, Maxence fait raser la ville.
L’empereur Constantin le Grand (306-337) la reconstruit ; les habitants, reconnaissants, la rebaptisent Constantina, la ville de Constantin, en l’honneur de leur bienfaiteur. Constantine va connaître encore des troubles suscités par la violente opposition entre l’Eglise catholique, soutenue par Rome, et l’Eglise donatiste, opposée à la domination romaine. Comme partout ailleurs, les donatistes seront persécutés. Le conflit durera jusqu’à l’arrivée des Arabes.

*** (IV)***
En passant à l’islam, Constantine va garder une certaine autonomie et même prospérer. Elle sera même, aux Xe et XIe siècles, selon les géographes arabes El-Bekri et El-Idrissi, la seule région du Maghreb central à conserver, en cette époque de troubles, une certaine puissance économique.
Cette position, elle la doit aux riches terres agricoles dont elle est entourée et dont elle tire, depuis les temps anciens, sa richesse. Cette prospérité va attiser la convoitise de divers royaumes qui vont la dominer : Almoravides, Almohades, Hafcides… Les Turcs, qui s’installent en Algérie à partir du XVIe siècle, auront du mal, devant la résistance des Hafcides, à s’y installer mais ils finissent par l’occuper et la ville est choisie comme capitale du beylik de l’Est qui englobait essentiellement les villes de Annaba, Batna et Sétif.
La ville sera dotée de palais et de mosquées ainsi que de ponts qui vont la désenclaver.
Au XIXe siècle, l’écrivain français Guy de Maupassant, de passage à Constantine, écrira que la ville turque avait huit ponts et qu’il n’en restait plus que deux.
Le bey le plus célèbre de Constantine est Salah Bey qui la dote de beaux édifices, tels la médersa de Sidi El-Kettani et celle de Sidi Lakhdar.
Il sera assassiné en 1792, à l’instigation des maîtres d’Alger à l’emprise desquels il voulait échapper. C’est pour porter son deuil que les Constantinoises, à sa mort, porteront le voile noir et ne le quitteront plus.

***(V)***
Après la chute d'Alger, Constantine, qui refuse de se soumettre à l'autorité française, acquiert une indépendance de fait. Les Français vont tenter de s'en emparer, en 1836. La population, sous la direction d'Ahmed Bey, va leur opposer une résistance farouche.
Ce n'est qu'en 1837 qu'ils pourront, à la tête de grosses troupes, entrer dans la ville qui est alors livrée au pillage et au massacre. Ahmed Bey et ses partisans vont se réfugier dans les Aurès, où ils continueront à harceler l'ennemi pendant onze années.
Mais Constantine, comme le reste de l'Algérie, est désormais sous domination coloniale, une domination qui durera plus d'un siècle. Dès leur installation, les Français entreprennent la construction de nouveaux quartiers destinés aux Européens.
En 1844, une ordonnance divise la ville en deux parties : la ville musulmane, qui est en fait la Casbah, laissée par les Turcs, et la ville européenne, avec des rues rectilignes.
Le pont d'El-Kantara, construit en 1792 par Salah Bey, s'effondre en 1857, après le passage d'un détachement de l'armée française. ll est reconstruit. Le pont de Sidi Rached, est achevé en 1912. Mais le pont le plus célèbre de Constantine est le pont suspendu de Sidi M'cid, qui joint les versants du Rummel.

source: Infosoir