Hansel et Gretel
24-01-2017, 11:03 PM
A l'orée d'une grande forêt vivaient un pauvre bûcheron, sa
femme et ses deux enfants. Le garçon s'appelait Hansel et la fille
Grethel. La famille ne mangeait guère. Une année que la famine
régnait dans le pays et que le pain lui-même vint à manquer, le
bûcheron ruminait des idées noires, une nuit, dans son lit et
remâchait ses soucis. Il dit à sa femme
– Qu'allons-nous devenir ? Comment nourrir nos pauvres
enfants, quand nous n'avons plus rien pour nous-mêmes ?
– Eh bien, mon homme, dit la femme, sais-tu ce que nous
allons faire ? Dès l'aube, nous conduirons les enfants au plus
profond de la forêt nous leur allumerons un feu et leur donnerons
à chacun un petit morceau de pain. Puis nous irons à notre
travail et les laisserons seuls. Ils ne retrouveront plus leur chemin
et nous en serons débarrassés.
– Non, femme, dit le bûcheron. je ne ferai pas cela ! Comment
pourrais-je me résoudre à laisser nos enfants tout seuls
dans la forêt ! Les bêtes sauvages ne tarderaient pas à les dévorer.

– Oh ! fou, rétorqua-t-elle, tu préfères donc que nous mourions
de faim tous les quatre ? Alors, il ne te reste qu'à raboter
les planches de nos cercueils.
Elle n'eut de cesse qu'il n'acceptât ce qu'elle proposait.
– Mais j'ai quand même pitié de ces pauvres enfants, dit le
bûcheron.
Les deux petits n'avaient pas pu s'endormir tant ils avaient
faim. Ils avaient entendu ce que la marâtre disait à leur père.
Grethel pleura des larmes amères et dit à son frère :
– C'en est fait de nous
– Du calme, Grethel, dit Hansel. Ne t'en fais pas ; Je trouverai
un moyen de nous en tirer.
Quand les parents furent endormis, il se leva, enfila ses habits,
ouvrit la chatière et se glissa dehors. La lune brillait dans le
ciel et les graviers blancs, devant la maison, étincelaient comme
des diamants. Hansel se pencha et en mit dans ses poches autant
qu'il put. Puis il rentra dans la maison et dit à Grethel :
– Aie confiance, chère petite sœur, et dors tranquille. Dieu
ne nous abandonnera pas.
Et lui-même se recoucha.
Quand vint le jour, avant même que le soleil ne se levât, la
femme réveilla les deux enfants :
– Debout, paresseux ! Nous allons aller dans la forêt pour y
chercher du bois. Elle leur donna un morceau de pain à chacun
et dit :
– Voici pour le repas de midi ; ne mangez pas tout avant,
car vous n'aurez rien d'autre.
Comme les poches de Hansel étaient pleines de cailloux,
Grethel mit le pain dans son tablier. Puis, ils se mirent tous en
route pour la forêt. Au bout de quelque temps, Hansel s'arrêta et
regarda en direction de la maison. Et sans cesse, il répétait ce
geste. Le père dit :
– Que regardes-tu, Hansel, et pourquoi restes-tu toujours
en arrière ? Fais attention à toi et n'oublie pas de marcher !
– Ah ! père dit Hansel, Je regarde mon petit chat blanc qui
est perché là-haut sur le toit et je lui dis au revoir.
La femme dit :
– Fou que tu es ! ce n'est pas le chaton, c'est un reflet de soleil
sur la cheminée. Hansel, en réalité, n'avait pas vu le chat.
Mais, à chaque arrêt, il prenait un caillou blanc dans sa poche et
le jetait sur le chemin.
Quand ils furent arrivés au milieu de la forêt, le père dit :
– Maintenant, les enfants, ramassez du bois ! je vais allumer
un feu pour que vous n'ayez pas froid.
Hansel et Grethel amassèrent des brindilles au sommet
d'une petite colline. Quand on y eut mit le feu et qu'il eut bien
pris, la femme dit : – Couchez-vous auprès de lui, les enfants, et
reposez-vous. Nous allons abattre du bois. Quand nous aurons
fini, nous reviendrons vous chercher. Hansel et Grethel s'assirent
auprès du feu et quand vint l'heure du déjeuner, ils mangè-
rent leur morceau de pain. Ils entendaient retentir des coups de
hache et pensaient que leur père était tout proche. Mais ce
n'était pas la hache. C'était une branche que le bûcheron avait
attachée à un arbre mort et que le vent faisait battre de-ci, de-là.
Comme ils étaient assis là depuis des heures, les yeux finirent
par leur tomber de fatigue et ils s'endormirent. Quand ils se ré-
veillèrent, il faisait nuit noire. Grethel se mit à pleurer et dit :
– Comment ferons-nous pour sortir de la forêt ?
Hansel la consola
– Attends encore un peu, dit-il, jusqu'à ce que la lune soit
levée. Alors, nous retrouverons notre chemin.
Quand la pleine lune brilla dans le ciel, il prit sa sœur par la
main et suivit les petits cailloux blancs. Ils étincelaient comme
des écus frais battus et indiquaient le chemin. Les enfants marchèrent
toute la nuit et, quand le jour se leva, ils atteignirent la
maison paternelle. Ils frappèrent à la porte. Lorsque la femme
eut ouvert et quand elle vit que c'étaient Hansel et Grethel, elle
dit :
– Méchants enfants ! pourquoi avez-vous dormi si longtemps
dans la forêt ? Nous pensions que vous ne reviendriez
jamais.
Leur père, lui, se réjouit, car il avait le cœur lourd de les
avoir laissés seuls dans la forêt.
Peu de temps après, la misère régna de plus belle et les enfants
entendirent ce que la marâtre disait, pendant la nuit, à son
mari :
– Il ne nous reste plus rien à manger, une demi-miche seulement,
et après, finie la chanson ! Il faut nous débarrasser des
enfants ; nous les conduirons encore plus profond dans la forêt
pour qu'ils ne puissent plus retrouver leur chemin ; il n'y a rien
d'autre à faire.
Le père avait bien du chagrin. Il songeait – « Il vaudrait
mieux partager la dernière bouchée avec les enfants. » Mais la
femme ne voulut n'en entendre. Elle le gourmanda et lui fit
mille reproches. Qui a dit « A » doit dire « B. »Comme il avait
accepté une première fois, il dut consentir derechef.
Les enfants n'étaient pas encore endormis. Ils avaient tout
entendu. Quand les parents furent plongés dans le sommeil,
Hansel se leva avec l'intention d'aller ramasser des cailloux
comme la fois précédente. Mais la marâtre avait verrouillé la
porte et le garçon ne put sortir. Il consola cependant sa petite
sœur :
– Ne pleure pas, Grethel, dors tranquille ; le bon Dieu nous
aidera.
Tôt le matin, la marâtre fit lever les enfants. Elle leur donna
un morceau de pain, plus petit encore que l'autre fois. Sur la
route de la forêt, Hansel l'émietta dans sa poche ; il s'arrêtait
souvent pour en jeter un peu sur le sol.
– Hansel, qu'as-tu à t'arrêter et à regarder autour de toi ?
dit le père. Va ton chemin !
– Je regarde ma petite colombe, sur le toit, pour lui dire au
revoir ! répondit Hansel.
– Fou ! dit la femme. Ce n'est pas la colombe, c'est le soleil
qui se joue sur la cheminée.
Hansel, cependant, continuait à semer des miettes de pain
le long du chemin.
La marâtre conduisit les enfants au fin fond de la forêt,
plus loin qu'ils n'étaient jamais allés. On y refit un grand feu et
la femme dit :
– Restez là, les enfants. Quand vous serez fatigués, vous
pourrez dormir un peu nous allons couper du bois et, ce soir,
quand nous aurons fini, nous viendrons vous chercher.
ہ midi, Grethel partagea son pain avec Hansel qui avait
éparpillé le sien le long du chemin. Puis ils dormirent et la soirée
passa sans que personne ne revînt auprès d'eux. Ils s'éveillè-
rent au milieu de la nuit, et Hansel consola sa petite sœur, disant
:
– Attends que la lune se lève, Grethel, nous verrons les
miettes de pain que j'ai jetées ; elles nous montreront le chemin
de la maison.
Quand la lune se leva, ils se mirent en route. Mais de miettes,
point. Les mille oiseaux des champs et des bois les avaient
mangées. Les deux enfants marchèrent toute la nuit et le jour
suivant, sans trouver à sortir de la forêt. Ils mouraient de faim,
n'ayant à se mettre sous la dent que quelques baies sauvages. Ils
étaient si fatigués que leurs jambes ne voulaient plus les porter.
Ils se couchèrent au pied d'un arbre et s'endormirent. Trois
jours s'étaient déjà passés depuis qu'ils avaient quitté la maison
paternelle. Ils continuaient à marcher, s'enfonçant toujours plus
avant dans la forêt. Si personne n'allait venir à leur aide, ils ne
tarderaient pas à mourir. ہ midi, ils virent un joli oiseau sur une
branche, blanc comme neige. Il chantait si bien que les enfants
s'arrêtèrent pour l'écouter. Quand il eut fini, il déploya ses ailes
et vola devant eux. Ils le suivirent jusqu'à une petite maison sur
le toit de laquelle le bel oiseau blanc se percha. Quand ils s'en
furent approchés tout près, ils virent qu'elle était faite de pain et
recouverte de gâteaux. Les fenêtres étaient en sucre.
– Nous allons nous mettre au travail, dit Hansel, et faire un
repas béni de Dieu. Je mangerai un morceau du toit ; ça a l'air
d'être bon !
Hansel grimpa sur le toit et en arracha un petit morceau
pour goûter. Grethel se mit à lécher les carreaux. On entendit
alors une voix suave qui venait de la chambre
– Langue, langue lèche !
Qui donc ma maison lèche ?
Les enfants répondirent
– C'est le vent, c'est le vent.
Ce céleste enfant.
Et ils continuèrent à manger sans se laisser détourner de
leur tâche. Hansel, qui trouvait le toit fort bon, en fit tomber un
gros morceau par terre et Grethel découpa une vitre entière,
s'assit sur le sol et se mit à manger. La porte, tout à coup, s'ouvrit
et une femme, vieille comme les pierres, s'appuyant sur une
canne, sortit de la maison. Hansel et Grethel eurent si peur
qu'ils laissèrent tomber tout ce qu'ils tenaient dans leurs mains.
La vieille secoua la tête et dit :
– Eh ! chers enfants, qui vous a conduits ici ? Entrez, venez
chez moi ! Il ne vous sera fait aucun mal.
Elle les prit tous deux par la main et les fit entrer dans la
maisonnette. Elle leur servit un bon repas, du lait et des beignets
avec du sucre, des pommes et des noix. Elle prépara ensuite
deux petits lits. Hansel et Grethel s'y couchèrent. Ils se
croyaient au Paradis.
Mais l'amitié de la vieille n'était qu'apparente. En réalité,
c'était une méchante sorcière à l'affût des enfants. Elle n'avait
construit la maison de pain que pour les attirer. Quand elle en
prenait un, elle le tuait, le faisait cuire et le mangeait. Pour elle,
c'était alors jour de fête. La sorcière avait les yeux rouges et elle
ne voyait pas très clair. Mais elle avait un instinct très sûr,
comme les bêtes, et sentait venir de loin les êtres humains.
Quand Hansel et Grethel s'étaient approchés de sa demeure,
elle avait ri méchamment et dit d'une voix mielleuse :
– Ceux-là, je les tiens ! Il ne faudra pas qu'ils m'échappent !
ہ l'aube, avant que les enfants ne se soient éveillés, elle se
leva. Quand elle les vit qui reposaient si gentiment, avec leurs
bonnes joues toutes roses, elle murmura :
– Quel bon repas je vais faire !
Elle attrapa Hansel de sa main rêche, le conduisit dans une
petite étable et l'y enferma au verrou. Il eut beau crier, cela ne
lui servit à rien. La sorcière s'approcha ensuite de Grethel, la
secoua pour la réveiller et s'écria :
– Debout, paresseuse ! Va chercher de l'eau et prépare
quelque chose de bon à manger pour ton frère. Il est enfermé à
l'étable et il faut qu'il engraisse. Quand il sera à point, je le mangerai.

Grethel se mit à pleurer, mais cela ne lui servit à rien. Elle
fut obligée de faire ce que lui demandait l'ogresse. On prépara
pour le pauvre Hansel les plats les plus délicats. Grethel, elle,
n'eut droit qu'à des carapaces de crabes. Tous les matins, la
vieille se glissait jusqu'à l'écurie et disait : – Hansel, tends tes
doigts, que je voie si tu es déjà assez gras.
Mais Hansel tendait un petit os et la sorcière, qui avait de
mauvais yeux, ne s'en rendait pas compte. Elle croyait que
c'était vraiment le doigt de Hansel et s'étonnait qu'il n'engraissât
point. Quand quatre semaines furent passées, et que l'enfant
était toujours aussi maigre, elle perdit patience et décida de ne
pas attendre plus longtemps.
– Holà ! Grethel, cria-t-elle, dépêche-toi d'apporter de
l'eau. Que Hansel soit gras ou maigre, c'est demain que je le tuerai
et le mangerai.
Ah, comme elle pleurait, la pauvre petite, en charriant ses
seaux d'eau, comme les larmes coulaient le long de ses joues !
– Dieu bon, aide-nous donc ! s'écria-t-elle. Si seulement les
bêtes de la forêt nous avaient dévorés ! Au moins serions-nous
morts ensemble !
– Cesse de te lamenter ! dit la vieille ; ça ne te servira à
rien !
De bon matin, Grethel fut chargée de remplir la grande
marmite d'eau et d'allumer le feu.
– Nous allons d'abord faire la pâte, dit la sorcière. J'ai déjà
fait chauffer le four et préparé ce qu'il faut. Elle poussa la pauvre
Grethel vers le four, d'où sortaient de grandes flammes.
– Faufile-toi dedans ! ordonna-t-elle, et vois s'il est assez
chaud pour la cuisson. Elle avait l'intention de fermer le four
quand la petite y serait pour la faire rôtir. Elle voulait la manger,
elle aussi. Mais Grethel devina son projet et dit :
– Je ne sais comment faire, comment entre-t-on dans ce
four ?
– Petite oie, dit la sorcière, l'ouverture est assez grande,
vois, je pourrais y entrer moi-même.
Et elle y passa la tête. Alors Grethel la poussa vivement
dans le four, claqua la porte et mit le verrou. La sorcière se mit à
hurler épouvantablement. Mais Grethel s'en alla et cette épouvantable
sorcière n'eut plus qu'à rôtir.
Grethel, elle, courut aussi vite qu'elle le pouvait chez Hansel.
Elle ouvrit la petite étable et dit :
– Hansel, nous sommes libres ! La vieille sorcière est
morte !
Hansel bondit hors de sa prison, aussi rapide qu'un oiseau
dont on vient d'ouvrir la cage. Comme ils étaient heureux !
Comme ils se prirent par le cou, dansèrent et s'embrassèrent !
N'ayant plus rien à craindre, ils pénétrèrent dans la maison de
la sorcière. Dans tous les coins, il y avait des caisses pleines de
perles et de diamants.
– C'est encore mieux que mes petits cailloux ! dit Hansel en
remplissant ses poches.
Et Grethel ajouta
– Moi aussi, je veux en rapporter à la maison !
Et elle en mit tant qu'elle put dans son tablier.
– Maintenant, il nous faut partir, dit Hansel, si nous voulons
fuir cette forêt ensorcelée.
Au bout de quelques heures, ils arrivèrent sur les bords
d'une grande rivière.
– Nous ne pourrons pas la traverser, dit Hansel, je ne vois
ni passerelle ni pont.
– On n'y voit aucune barque non plus, dit Grethel. Mais
voici un canard blanc. Si Je lui demande, il nous aidera à traverser.
Elle cria :
– Petit canard, petit canard,
Nous sommes Hansel et Grethel.
Il n'y a ni barque, ni gué, ni pont,
Fais-nous passer avant qu'il ne soit tard.
Le petit canard s'approcha et Hansel se mit à califourchon
sur son dos. Il demanda à sa sœur de prendre place à côté de lui.
– Non, répondit-elle, ce serait trop lourd pour le canard.
Nous traverserons l'un après l'autre.
La bonne petite bête les mena ainsi à bon port. Quand ils
eurent donc passé l'eau sans dommage, ils s'aperçurent au bout
de quelque temps que la forêt leur devenait de plus en plus familière.
Finalement, ils virent au loin la maison de leur père. Ils
se mirent à courir, se ruèrent dans la chambre de leurs parents
et sautèrent au cou de leur père. L'homme n'avait plus eu une
seule minute de bonheur depuis qu'il avait abandonné ses enfants
dans la forêt. Sa femme était morte. Grethel secoua son
tablier et les perles et les diamants roulèrent à travers la chambre.
Hansel en sortit d'autres de ses poches, par poignées. C'en
était fini des soucis. Ils vécurent heureux tous ensemble.


سحر الحرف والكلام


شكرا للأخ صقر الأوراس على التوقيع
التعديل الأخير تم بواسطة warda22 ; 24-01-2017 الساعة 11:18 PM